Allez Raconte!

Raconter les histoires, c’est d’abord et surtout un art.
L’art du rêve, de l’imagination.
Un papa, Laurent, aime raconter les histoires. Il les raconte si bien que ses enfants lui demandent de participer à un concours télévisé.
Deux ou trois tirades. Et le décor est déjà planté.
A priori, un scénario hyper simpliste pour d’aucuns.
Mais à la réflexion, on se rend compte que les auteurs ont très bien réussi à comprendre le monde secret et merveilleux des enfants.
Tout est source d’interrogations, de mystères, de joies, et d’enchantements.
Ainsi, un voyage en voiture se transforme en délire collectif où les adultes y perdent un peu la tête pour le plaisir des yeux et des oreilles.
On se laisse doucement entraîner dans ce monde de fous rires et de liberté permanente.
La vision que les enfants entretiennent du monde des grands est reflétée avec justesse sans tomber dans l’exagération ou la caricature facile.
Les adultes se voient dépeints avec un certain réalisme, preuve que rien n’échappe aux regards curieux de nos chers bambins : les papas peuvent craquer devant un patron, ils rusent, ils négocient avec leur épouse, ils se trompent, ils mentent, ils disent des gros mots,…
Évidemment, nous sommes loin d’une superproduction américaine où les effets spéciaux succèderaient aux cascades en tous genres…
Ici, tout reflète la bonne production européenne, avec quelques références pour adultes, ce qui rend le film finalement très accessible et familial.
Le côté naïf qui nous est proposé, projette aussi la vision d’un monde que nous avons, pour la plupart, rangé dans une caisse au grenier en échange d’une dose de sérieux, de rationalité et de sentiments mesurés.

Nos p’tits filous, eux, observent toute chose avec des yeux neufs, s’émerveillent pour un rien et ont consacré définitivement l’imagination comme reine de leur royaume où sévissent gaiement lutins, extra-terrestres et princesses.
Les auteurs du film ont choisi des couleurs vives, chatoyantes sans être agressives, insupportables voire tapageuses.
On remarquera l’absence de toute violence gratuite et un langage comme piqué live d’une cour de récré…
Avec un brin de provocation et de contradiction, les gros mots – ces fameux gros mots interdits par toute éducation qui se respecte – sont mis dans la bouche d’un papa comme pour nous le rendre plus proche, plus attachant.
Comment ne pas parler d’Elie Semoun et de sa voix ? Il porte le film à bout de bras et de langue, si j’osais.
On le connaît bien ce petit bonhomme et pourtant, c’est lui qui nous bluffe à chaque fois. Ironie, humour grinçant, un peu décalé, juste mordant comme il faut.
Et ce concours ?
Inspiré de la télé des grands, de ses jeux où l’on exclut des candidats à tour de bras, de ses présentateurs irrespectueux de leur propre public et tombant dans le ridicule à force de vouloir trop en faire.
Les enfants ont déjà bien cerné notre monde et ses pseudo-valeurs…
L’épilogue se révèle heureux et optimiste : la famille unie et ingénieuse l’emporte sur les plans diabolique des méchants déguisés en dinosaures.
C’est Laurent, le gentil papa, qui gagne le prix et fait preuve de modestie dans la victoire.
Une belle morale et une jolie conclusion.
« Papa, c est déjà fini ? » me glisse ma fille.
Je lui souris.
Il est vrai qu’une heure en joyeuse compagnie passe toujours si vite.

David Robert

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