Vivre ou mourir selon Xavier Beauvois

« Des Hommes et des Dieux »

Acteurs: Lambert Wilson – Michael Lonsdale – Philippe Laudenbach – Sabrina Ouazani – Olivier Rabourdin

Sortie: 08/09/2010

Pressenti pour la Palme d’Or, enlevée par le formidable « Oncle Boonmee » du Thailandais Apichatpong Weerasethakul, « Des Hommes et des Dieux » de Xavier Beauvois est toutefois reparti de Cannes avec le très louable Grand Prix du Jury.

Particulièrement intelligent et prenant le film s’inspire très librement de la vie des 8 moines Cisterciens français à Tibhirine en Algérie, de 1993 jusqu’à leur enlèvement et leur exécution le 21 mai 1996 par un groupe de moujahidines. Une juste et belle harmonie existe entre les moines et les habitants du village, pour la majorité de confession musulmane, magnifique et jubilatoire rencontre de « deux » dieux et de deux traditions. Cette cohabitation, nourrie de dévouement réciproque, est perturbée par la terreur imposée par des religieux radicaux qui sévissent alors dans la région. Vu la menace, faut-il partir ou rester ? Mais pour les habitants, le monastère et ses moines constituent la branche sur laquelle, eux, les oiseaux se reposent. Le Village a grandit avec le monastère qui constitue sa protection. Par amour de dieu et des frères musulmans, il est donc naturel de rester, même si c’est aussi fou que de se faire moine, au risque de devenir martyr.

Ce film ambitieux, qui souffre tout de même de quelques longueurs, rythmé avec subtilité par la vie monastique, les prières et les réflexions diverses, soulève de grandes questions humanistes comme l’altruisme, le dilemme moral, la vertu, l’abnégation, l’engagement et le don de soi, le mystère de la foi, notamment. La réalisation, plutôt sobre, se concentre sur les atmosphères bienveillantes et sur la terreur grandissante qui se lit dans les regards de tous, moines et autochtones. Les comédiens, tous particulièrement attachants dans leurs rôles, jouent avec crédibilité et une étonnante sincérité. Lambert Wilson incarne avec brio le frère supérieur qui, pacifique inébranlable, a du mal à refouler sa colère intérieure. Et l’on se régale de la délicieuse bienveillance du débonnaire Michael Lonsdale et de son humour très spirituel. La séquence autour de la question « c’est quoi être amoureux » entre frère Luc et Rabbia est un pur régal (la photo que nous avons sélectionnée).

Xavier Beauvois nous offre une bouleversante galerie de portraits et pose chaque séquence en parabole, les plus saisissantes étant celles du chant des moines perturbé par le vol d’un hélicoptère militaire et celle du silencieux « dernier repas » avec pour fond sonore « la mort du cygne » de Tchaïkovski.

A voir dès à présent, un film très réussi qui appelle à la méditation.

© GS 12-09-2010

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