LIBAN Mercredi 18 septembre 2024

GUERRE SEPTEMBRE/OCTOBRE 2024

Mercredi18 septembre 2024
C’est vrai qu’en venant au Liban on a toujours des surprises, mais cette fois elle est d’une
violence inouïe et s’est produite deux jours après mon arrivée.

Le 17 septembre, 2800 pagers (bipers : appareils utilisés pour transmettre des messages), on a
parlé après de 3000 en circulation sur un total 4000 disponibles, portés par des membres du
hezbollah ont explosé. Les porteurs de ces appareils ont été ciblés et blessés ou certains tués.
La plupart sont handicapés à vie.

C’est dans un magasin, proche d’un quartier commercial populaire très fréquenté où je me
suis rendue avec ma sœur, que j’ai appris la nouvelle. C’est en voyant un grand nombre
d’ambulances passer et un trafic anormal à cette heure de la journée qu’on s’est inquiété et
que le vendeur du magasin a parlé de plusieurs explosions d’appareils portables, une ayant eu
lieu devant son magasin.

Les personnes paniquées par la nouvelle étaient pressées de rentrer chez elles. Du coup
l’ambiance est devenue menaçante et comme on ne connaissait pas encore de détails, tout le
monde rentrait chez soi s’attendant au pire, dans un trafic devenu monstre.

Un bilan grave est annoncé le soir à la télé, qui émettait en continu, recueillant divers
témoignages et tentant de préciser ce qui se passait. L’explication est donnée : des appareils
bipers, importés par le hezbollah de Taiwan, transitant par une compagnie bulgare, ont été
minés et leurs porteurs qui répondaient à un message voyaient l’appareil exploser entre leurs
mains. Ce sont surtout les doigts, les yeux et l’abdomen qui étaient touchés. Des corps
ensanglantés jonchaient les urgences des hôpitaux de Beyrouth, du sud du pays et même
d’autres régions, où se trouvaient les porteurs des pagers. Vision apocalyptique qu’on n’avait
pas vu depuis longtemps.

Résultat impressionnant et désastreux : deux dizaines de morts et des jeunes handicapés à vie,
même des enfants qui se trouvaient à proximité d’un appareil ont été touchés.

Réponse mince des autorités d’un gouvernement de gestion affaibli face à un ennemi qui s’est
juré d’abattre le hezbollah : Il a porté plainte devant l’ONU. Impuissance, colère et désarroi
des personnes concernées et de l’ensemble du pays.

Comme si cela ne suffisait pas le lendemain 18 septembre, ce sont des appareils sans fil
également utilisés par le hezbollah pour ses communications, qui explosaient. Importés tout
aussi illégalement que les pagers. Explosions plus fortes détruisant une voiture ou l’étage
d’un appartement. En moindre nombre, on parlait de 200 appareils, ayant provoqué une
dizaine de morts, mais de nombreux blessés.

Israël s’en prend au réseau de communication du hezb, qui avait trouvé pour communiquer
d’autres moyens que les téléphones portables facilement traçables. Comme la veille, les
blessés arrivent par dizaines tout ensanglantés, dans les différents hôpitaux : vision chaotique,
dramatique, insupportable…

D’un coup toute la vie active ralentit et se met presque à l’arrêt. Les personnes attendent voir
ce qui va se passer, écoutent les explications des médias, qui arrivent au compte-goutte.

Depuis des mois Israël menace la frontière sud où tous les jours elle échange des tirs avec le
hezbollah (hezb). Mais les bombardements se font de plus en plus puissants. Elle veut faire
reculer le hezb et créer une zone tampon pour protéger sa population des implantations au
nord, qui a fui les tirs et qu’elle veut faire revenir. Zone tampon qui aura peu d’effets, car les
engins utilisés sont de portée variable et peuvent aller assez loin.

Un sentiment de peur et de frustration domine dans la population, face à des enjeux sur
lesquels elle n’a pas de prise.

Le lendemain, retour presque à la normale, il faut que la vie continue.

Jusqu’à présent, on n’a pas su comment les pagers ont été minés et où. Différentes enquêtes
sont ouvertes une par les autorités, une autre par le hezb. Auront-elles des résultats ? Tout le
monde doute. Des mois plus tard, on n’a jamais rien su.

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