III-ON RECONFINE (7)

Lundi 13 juillet

Une carte blanche de Franklin Dehousse, professeur à l’Université de Liège, attire l’attention sur une problématique que la crise a accentuée.

C’est une lettre ouverte aux jeunes imbéciles, qui prennent le coronavirus pour un problème de vieux cons » lxi. Il critique les jeunes qui ne rendent pas compte de la gravité de la situation et la prennent à la légère, mettant en danger la vie d’autrui. Cette lettre a suscité des réactions dont celle d’un enseignant Regis Falque de Namur lxii. C’est une vision qui veut opposer « jeunes imbéciles » et « vieux cons » (qualificatif hypothétiquement donné par les premiers aux seconds), entre jeunesse un peu crétine et baby-boomers grincheux. Elle pose un problème, parce que qu’elle manque de nuances et de perspectives. « J’ai, sur ces jeunes que je côtoie quotidiennement comme enseignant, un regard bien différent. Mais, comme le disait Dostoïevski : « Chacun ne peut juger que d’après soi-même », affirme cet enseignant.

Pourtant, les « jeunes » ont été les premiers à être exposés, à nouveau, aux risques de cette pandémie. Les écoles furent les premiers lieux à être déconfinés et ce sont des cohortes d’élèves et d’étudiants qui ont regagné les bancs de l’école avec souvent la peur et l’appréhension. Et puis ces mêmes jeunes ont dû réapprendre le vivre ensemble, une nouvelle
forme d’être à l’école avec les distances sociales. Ils ont changé leurs habitudes, ils ont dû s’adapter et suivre des consignes strictes. Pour les jeunes un peu moins jeunes, à savoir les étudiants, les tribulations académiques et les affres des cours en ligne mal fichus (les professeurs ne maîtrisant pas toujours les rudiments de l’informatique) qu’ils ont dû subir n’ont en rien facilité leur parcours. À l’âge des relations sociales, de la découverte, de l’appétit intellectuel et de l’envie de vivre, le monde leur a dit de rentrer chez eux et de s’enfermer. Et, au vu des chiffres et des avis d’experts, pas pour les protéger eux, mais pour protéger leurs ainés. Pas toujours dans de bonnes conditions. Pas toujours de façon cohérente. Pas toujours de façon stricte. Mais ils l’ont fait.

« Reprocher à des individus vivant le plus bel âge de ne pas être capables de le vivre au fond d’une chambre, d’un kot ou d’un appartement minuscule (avec, parfois, des enfants en bas âges), enfermés entre quatre murs, c’est déjà un pas. Mais en plus de tout cela, faire porter la responsabilité ultime d’un enchaînement bien plus complexe de causes et d’effets prenant racine dans les méandres d’une économie obsolète et saturée, cela frôle l’insulte faite à toute une génération. « Car ces « vieux cons » qui ont miné notre monde ont aussi tiré tous les bénéfices acceptables d’années fastes pour traverser aujourd’hui le confinement dans l’allégresse », poursuit Regis Falque.

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