II- Un Déconfinement Progressif (12)

Dimanche 17 mai

Le déconfinement se poursuit et s’accélère.

L’Allemagne ouvre ses frontières au sein de l’espace Schengen, suivie par l’Italie. Elle affirme sa fidélité au maintien de cet espace de liberté de circulation des personnes, pas de quarantaine pour ceux qui traversent les frontières. Le déconfinement s’élargit sans mesures de précaution suffisantes. On verra comme ce sera dans la pratique.

Ici les précautions requises ne sont pas respectées : à la boulangerie l’employé n’avait ni gants, ni masque. Les conditions ne permettent aucune distance minimale possible entre lui et le client.

Dans le tram, la plupart des personnes n’ont pas de masque. Une partie des chauffeurs de bus ont arrêté de travailleurs pour protester contre le fait qu’ils ne peuvent pas faire respecter les consignes gouvernementales : ni masques, ni respect d’un nombre maximum de personnes par bus. Seuls dans leur bus, ils disent ne pas pouvoir conduire et faire respecter les consignes. Progressivement tout le monde va porter un masque dans les transports publics. Mais cela aura mis du temps, avec les graves conséquences résultant de la contamination.

La réouverture des classes reste un vrai casse-tête

Certaines avaient ouvert le 11 mai : la sixième primaire et la dernière du secondaire. A partir du 18 mai ce sont toutes les classes. Kroll dans sa caricature prévoit les situations rocambolesques qui en résultent, à la fois pour les professeurs et les élèves. N’aurait-il pas mieux valu les laisser fermer jusqu’à la prochaine rentrée, vu qu’on est déjà presque fin mai ? Sauf, qu’en Belgique ou du moins à Bruxelles, le suivi quotidien des élèves est resté très lacunaire. Pour les primaires, les travaux assez limités sont mis sur un site, que les parents consultent.

Lundi, c’est une rentrée progressive, avec cette question cruciale : comment vivre en collectif avec le virus ? Bruno Humbeek, un psychologue veut répondre au souci des familles de savoir s’il faut envoyer ou non ses enfants à l’école. Il propose d’appliquer le mécanisme des trois tamis de Socrate : est-ce que je pense qu’il est sécurisant de faire rentrer mon enfant à l’école ? Est-ce bon pour ses contacts sociaux et sa manière d’apprendre ? Si la réponse est oui à ces deux questions, la troisième consiste à se demander si c’est bon pour lui. Si la réponse est non, il vaudra mieux garder votre enfant à la maison et ne pas se culpabiliser. Il ajoute : « Le bateau école est prêt à quitter le port, s’il y a un défaut dans la cale, on ne part pas ». Le lien social est, en ce moment, considéré comme le plus important.

Une image d’une cour de récréation a bouleversé les internautes. On voyait de jeunes enfants assis sur le bitume chacun dans un carré tracé à la craiexxvii. Les experts dédramatisent la situation en disant que les enfants ont l’habitude de vivre dans la contrainte des règles que leur fixent les adultes. Ils peuvent prendre ces situations comme un jeu. On peut prendre le marquage de distanciation comme un nouveau jeu. Un pédiatre commente que le véritable risque pour l’enfant est de le priver de ses camarades et d’un environnement socio-éducatif.

Comme les enfants doivent maintenir les distances, eux et les éducateurs ont aussi pleins d’idées pour de nouveaux jeux : l’élastique, « un deux trois soleil », la marelle, le jeu des quilles, les mimes, les devinettes… Il faut oublier de jouer au loup ou à des jeux impliquant un contact. En plus, les enfants sont ravies de jouer avec leur maitresse surtout s’ils sont moins nombreux, ce qui crée un lien plus affectif qu’avant. Les enfants s’adaptent et assimilent facilement les contraintes.

En revanche, les plus petits habitués aux jeux d’imagination ont davantage de difficultés à s’adapter aux nouveaux jeux. L’une des maitresses propose un jeu de règles. Au bout d’un moment, les petits sont venus voir la maitresse et lui ont dit : « Est-ce qu’on peut vraiment jouer maintenant maitresse ? ».

Certains n’ont pas le choix !

A propos de la rentrée des écoles, je peux donner le témoignage de Ryan de 5 ans et de sa mère. Elle le réveille tôt le matin, car elle assure la garderie qui commence à 6h30 jusqu’à 8h30, heure où les instits prennent le relai. Puis, plus tard, elle revient pour la garderie de l’après-midi. Sa maman a son masque tout ce temps et de temps à autre elle dit aux enfants « Hé les enfants je vous fais un sourire ! ».

Elle passe beaucoup de temps à désinfecter, les tables, les interrupteurs, les poignées de porte, les porte-manteaux. Les mains des enfants, les jouets « tout ce qui est touché par les parents ou par les enfants ». Elle efface toute trace de vie… A la rentrée en classe, elle remarque : « Je dis souvent on dirait des petits prisonniers quand ils traversent le matin la cour, en file indienne, à un mètre de distance l’un de l’autre ! »

Les enfants comprennent la situation, tout comme le petit Ryan, ils sont tous bien informés et font avec.

Voilà l’école c’est comme ça, en attendant que ça aille mieux. Et ça continuera ainsi surement jusqu’aux vacances d’été xxviii.

Une réflexion émerge de cette crise sur de nouveaux modèles d’éducation, partagées entre présence en classe et travail à la maison. Les termes présentiels et distanciels sont entrés dans le langage courants. Mais il faut que l’environnement numérique soit performant et qu’ils soient disponibles pour tous. On peut parler de fracture numérique, liée surtout à la différence de classes sociales. Une enquête en Flandre montre que deux jeunes sur trois n’ont pas accès à un ordinateur et quatre sur cinq ont des problèmes pour gérer le travail scolaire à la maison ; un vide urgent à combler.

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