Progression de la pandémie (25)

Lundi 20 avril


Ce matin je trouve sur mon ordi une lettre ouverte de la Fédération laïque des centres de planning familial. Elle attire l’attention sur les difficultés d’accès à la santé sexuelle et reproductive.

Avec la pandémie, ces centres sont désertés. C’est une baisse de 80% de leur activité. Quelles conséquences pour les femmes surtout celles qui se trouvent dans une situation précaire ? Il s’agit surtout de la contraception. Il y a une crainte d’un boum de grossesses non désirées, une diminution des interruptions volontaires de grossesses et une augmentation des maladies sexuelles avec des complications gynécologiques. Pourtant les responsables affirment que les centres sont bien contrôlés du point de vue sanitaire.

Les femmes craignent les contrôles de routine, lorsqu’elles se déplacent loin de chez elles en dehors de leur commune. Les policiers ne sont pas bien informés de ce genre de situation. Il y a une tendance à reporter les soins et un manque d’information quant à l’ouverture des centres.

La lettre ouverte adressée à la Première Ministre et aux ministres responsables de la santé demande que plus d’information soit donnée sur l’accès aux centres. Ils veulent favoriser l’accès aux médicaments contraceptifs, sans ordonnance et à soutenir les centres au bord de la faillite.

Encore une réflexion sur le covid :
Selon le philosophe français André Comte Sponville, on est confronté à un taux de mortalité de 1 à 2% en raison du virus. Pourtant les personnes sont très effrayées. C’est que les médias surtout la télé en parle en permanence, ce qui entretient l’anxiété. En même temps qu’une mondialisation du virus, il y a une mondialisation de l’information, simultanément sur tous les pays du monde. Il ajoute : « Cette pandémie nous apprend à vivre avec l’incertitude ». Elle a
eu aussi le mérite de faire coopérer les scientifiques du monde entier. Il ajoute : « Le covid 19 qui fait que nous pensons à la mort plus souvent, pourrait nous pousser à vivre plus intensément, plus lucidement… ».

Certains pays commencent à déconfiner progressivement.

C’est le cas de l’Allemagne. La pandémie a fait cinq fois moins de morts et 5 fois moins de personnes ont été aux soins intensifs. Ils ont fait beaucoup de tests et ont installé des tentes un peu partout. Ils ont cerné les foyers d’épidémie. Ils ont équipé tout le monde de masques et sont plus disciplinés dans l’application des consignes. Les hôpitaux n’ont pas de problèmes financiers, sont même excédentaires et sont mieux équipés. Ils n’ont pas eu de coupes budgétaires ! Ce n’est pas le cas de la France où 100 000 lits ont disparus en vingt ans.

Le déconfinement progressif exige le maintien des masques et de la distanciation. Les commerces de moins de 800 m2 ont ouvert. Bientôt, les écoles pourront accueillir les élèves.

La Suède a opté pour une autre approche. Elle a peu de cas et seulement 1500 morts. Elle a décidé de ne pas confiner. Les autorités comptent sur la responsabilité des citoyens. Ils donnent quelques recommandations comme le maintien des distances et l’hygiène des mains. Ils interdisent les rassemblements de plus de 50 personnes. Les magasins sont ouverts et la vie parait normale. Pourtant, une épidémiologiste suédoise recommande de prendre des mesures
semblables à celles des autres pays européens. Elle pense qu’ils auraient pu éviter des décès.

Les autres pays voisins attendent. Les dirigeants ne veulent pas prendre de risques, malgré les pressions.

Cependant, en Belgique le secteur de la construction a regagné sa pleine activité. Près de chez moi, trois chantiers travaillent à plein. Ils n’emploient pas beaucoup d’ouvriers. Ce sont surtout des rénovations.

Et le pétrole !

Du jamais vu, le prix du pétrole est tombé à son niveau le plus bas 37 $. Il est même passé en mode négatif. La consommation a fortement diminué (30 millions de barils par jour au lieu de 100). Les producteurs ont payé pour faire stocker leur production. Certains reprennent les contrats, à condition qu’ils aient des capacités de stockage. C’est un impact énorme. Aucune crise, aucune guerre n’a eu un tel impact. C’est dû à l’arrêt total de toutes les économies. On
commence à s’en rendre vraiment compte. Pourquoi ne pas arrêter la production de pétrole ? C’est trop cher de couper les pompes des puits. « La production est presque fatale » dit Philippe Chalmain, spécialiste des matières premières. Pour d’autres matières premières, il y a eu aussi des prix négatifs, faute de demande. Cependant, à la pompe, le prix de l’essence n’a connu qu’une légère baisse. On a utilisé les stocks et les taxes, qui forment une partie
substantielle du prix, n’ont pas changé.

C’est la catastrophe économique dans les états américains, producteurs de pétrole, comme le Texas. On ne craint pas pour les industries pétrolières qui ont accumulé des profits, lorsque les prix ont augmenté. C’est plutôt dramatique pour les pays en voie de développement qui sont producteurs comme l’Algérie, l’Angola, l’Irak, le Venezuela qui traverse une crise terrible, …L’OPEP a de moins en moins de marge de manœuvre, la chute des prix la rend encore plus impuissante. Il est évident qu’avec la reprise progressive des activités, le prix remontera progressivement.

Le pétrole bon marché remet en cause le développement des énergies renouvelables. Il faudrait avoir une taxe carbone.

Alors, peut-on redémarrer différemment ? On y réfléchit tous. Qu’est-ce qu’on pourra réellement changer ? J’ai déjà parlé de mettre en relief certaines valeurs, en espérant que la majorité des citoyens veuillent vivre différemment.

Consommer plus local, serait-t-il possible ? Limiter les voyages ? On pose aussi la question de la réindustrialisation de l’Europe. L’inventivité n’a pas de limites. Une équipe de techniciens et d’ingénieurs « Make air » a mis au point un nouveau respirateur. Il a l’avantage de pouvoir être fabriqué facilement. Les inventeurs ont parcouru la France pour trouver les pièces nécessaires et ont été aidés par certaines entreprises pour le montage final. Leur respirateur coute 10 fois moins cher que d’autres. Ils fournissent aussi le mode de fabrication. Ils ont créé un nouveau logo « Make for life ».

Je suis sûre qu’il y a en ce moment beaucoup d’expériences de ce genre. Ce serait intéressant de les faire connaitre.

Il y en a encore qui profitent de la situation !

Sept sites frauduleux ont été montés par un individu pour vendre des masques et du gel hydroalcoolique. Un million de masques ont été vendus en 15 jours. Il promet des masques chirurgicaux, mais ils n’étaient pas conformes. Beaucoup de personnes sont victimes de cette fraude. Il y a aussi des gels hydroalcooliques frelatés, qui peuvent bruler les mains. Parfois les sites produisent de faux certificats pour les vendre. Quand ils sont poursuivis, ils disparaissent dans la nature.

Trouver un masque est encore un problème en Belgique. Peu de gens en portent.

Une bonne nouvelle ! Heureusement qu’il y en a de temps à autre : la régularisation des sans-papiers en Italie. Ce pays va permettre à 200 000 travailleurs agricoles clandestins, employés par des entreprises agricoles d’avoir accès à des papiers en règle. En fait, ce pays a besoin d’un nombre encore plus élevé de salariés, selon les syndicats du secteur la Confagri et la Coldiretti et il y aurait 600 000 sans-papiers. L’épidémie a fait baisser de 50% la production agricole dans certaines régions. Des couloirs verts ont été mis en place pour faire venir de la Roumanie 110 000 travailleurs, chiffre largement insuffisant. Evidemment, la droite de M. Salvini s’y est opposé, craignant un débarquement en masse d’émigrés. Dernièrement par bateau, il n’en est arrivé que 2800. Pas de quoi affoler un pays avec une population de 60 millions d’habitants !

La France manque aussi de saisonniers agricoles, par exemple, pour la récolte des fraises en Bretagne. Des chômeurs et des étudiants font le travail mais leur nombre reste insuffisant.

On se pose des questions sur le fait de garder les distances. Quel impact cette attitude aura-telle sur les relations sociales ?

A la sortie du confinement, pour les pays qui l’auront fait, on peut prévoir un changement de l’organisation de l’espace urbain. On voit partout des marquages au sol pour faire tenir les distances quand on attend : devant un magasin ou un supermarché, à une station de bus ou ailleurs. L’après confinement sera-t-il souligné par les marquages ? L’espace urbain sera-t-il modelé en fonction de la distance ?

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